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jeudi 1 septembre 2011

Charles De Gaulle (+film documentaire)


Général, homme d’état, homme politique et militaire (français) né en 22 novembre 1890 et décédé le 9 novembre 1970.

Dans les premières lignes de ses Mémoires de guerre, Charles évoque sa mère en ces termes : "Ma mère portait à la patrie une passion intransigeante, à l'égal de sa piété religieuse". Le foyer familial, catholique et patriotiste, est aussi très cultivé. A douze ans, la mémoire du général est prodigieuse : on peut déjà déceler ses auteurs préféré (Chateaubriand et bientôt, Péguy à propos duquel il confiera plus tard : "Aucun auteur ne m'a autant inspiré dans ce que j'ai entrepris de faire"), mais il est périlleux de savoir ce qu'il na pas lu, tant il dévore les rayons de l'immense bibliothèque familiale. Henri de Gaulle confie l'éducation du jeune Charles aux Jésuites et aux Assomptionnistes. Ses matières préférées sont l'histoire, la littérature et l'Allemand, qu'il parlera bientôt couramment grâce aux vacances passées chez les correspondants badois, sans doute alliés aux Kolb, grands-parents de sa mère.

C'est en 1907 qu'il se retrouve en Belgique, à l'école libre du Sacré-Coeur d'Antoing, où se sont repliés les Jésuites de l'Immaculée-Conception. La vocation militaire de Charles se déclare dès 14 ans. Après une année préparatoire au collège Stanislas à Paris, Charles est reçu en 1908, à 18 ans, à l'École militaire de Saint-Cyr, d'où sont issus depuis le XIXe siècle, les cadres politiques de la France. Ayant intégré l'École à un rang moyen (cent dix-neuvième), il en ressortira treizième en 1912. Il est alors affecté sur son choix au 33e régiment d'infanterie (RI) d'Arras, commandé par Philippe Pétain.

Trente-quatre ans séparent le jeune lieutenant du vieux colonel qui, à cinquante-six ans, commande l'obscur 33e RI, quand d'autres sont déjà généraux. Pétain, qui a perdu la foi, passe pour un libertin et compense ses déboires et sa réputation par un isolement et une froideur calculés. Pourtant, il sait parfois briser la glace pour ses officiers qu'il estime beaucoup. Voilà un caractère qui plaît au lieutenant de Gaulle, chez qui, semble-t-il, Pétain reconnaît aussitôt un disciple. Pétain note sur la nouvelle recrue, en 1913 : "Officier de réelle valeur qui donne les plus belles espérances pour l'avenir. Très intelligent, aime son métier avec passion... Digne de tous les éloges". Mais des tensions et des contradictions se font sentir entre Pétain et de Gaulle. C'est même pour toutes ces raisons que, sans attendre leur rupture historique de l'été 1940, de Gaulle se séparera de son chef, victime, l'âge venu, des travers qu'il avait jadis combattus.

2 Août 1914 : la guerre éclate et le vieux monde roule à l'abîme. Pétain rejoint le front pour entamer l'épopée qui en fera le vainqueur de Verdun. Blessé dès le 15 août à Dinant en affrontant avec ses camarades l'épreuve du feu. Blessé de nouveau au combat de Mesnie-les-Hurlus, en Champagne, le 10 mars 1915, il rejoint le 33e RI comme commandant de compagnie, puis adjoint au colonel Pétain. Le lieutenant de Gaulle devient à titre temporaire dès le mois de février 1916 (et définitivement en octobre suivant) capitaine. En mars 1915, il est décoré de la croix de guerre et cité à l'ordre de sa division. En février 1916, la compagnie de De Gaulle monte sur Verdun. Le 2 mars, écrasée par l’artillerie, au terme d'un corps à corps avec les Allemands, le capitaine de Gaulle s'écroule inanimé, frappé d'un coup de baïonnette. Il se réveillera prisonnier. Transfert à l'hôpital de Mayence. Commençant alors trente-deux mois d'une épouvantable captivité, ponctuée de cinq tentatives officielles d'évasion qui lui vaudront de passer du confort très relatif des premiers oflags à la cellule sans lumière des récidivistes.

Interné successivement à Osnabrück, Neisse, Sezwoyn, Inguestadt, Rosenberg, Passau, Ingolstadt encore puis Würzburg et Magdeburg, Charles de Gaulle n'ignore bientôt plus rien de la géographie pénitentiaire allemande. Quand il ne tente pas de s'évader, le capitaine en profite pour relire les auteurs grecs et latins et les contemporains qu'il avait négligés, mais aussi la presse et la littérature allemandes qu'on veut bien lui communiquer, organisant, dès qu'il peut, des conférences historiques ou philosophiques pour ses compagnons. Charles de Gaulle devra pourtant attendre le 11 novembre 1918 pour être libéré. A Lyon, il fête ses retrouvailles, le 3 décembre 1918, avec une France victorieuse. Charles de Gaulle gardera toujours un sentiment d'humiliation au coeur.

Les trois années suivantes, au cours desquelles il suit, de janvier 1919 à mai 1919, un cours obligatoire pour tous les anciens prisonniers, et participe comme instructeur volontaire à la lutte que livre la Pologne contre l'armée rouge, consolident ses réflexions d'hommes d'armes. Après vingt mois passés à l'École militaire de Rambertow puis à l'État-major de Varsovie, le capitaine de Gaulle rencontre Yvonne Vendroux, fille d'un industriel calaisien, qu'il épouse le 7 avril 1921.

En février 1921, et jusqu'à mai 1922, Charles de Gaulle est professeur d'histoire à Saint-Cyr, manifestant des dons de brillant pédagogue. Ceci lui permettra parallèlement de se consacrer à la préparation de l'École Supérieure de Guerre. Le 2 mai 1922, le Journal officiel publie l'admission du capitaine de Gaulle à l'École Supérieure de Guerre. Il y restera deux ans, non sans avoir subi les stages traditionnels auprès des différentes armes : dragons cantonnés à Paris, chars à Satory, aviation du Bourget, artillerie à Trèves... Les idées qu'il défend tranchent avec celles d'un corps professoral figé dans la tradition. Mais il y reçoit des notes médiocres :son assurance tellement appréciée au combat passe pour de l'orgueil ; son esprit d'initiative pour de l'indiscipline ; son humour pour de l'insolence. Il n'est pas admis à figurer sur la liste des futurs enseignants. Relégué dans un emploi subalterne à l'État-major de Mayence en 1924, il en est tiré par l'intervention de son ancien colonel, devenu le maréchal Pétain, alors au sommet de son prestige militaire et civil qui l'appelle à son cabinet comme officier rédacteur et l'impose comme conférencier à l'École de Guerre, tâche dont il s'acquittera, en sa présence, courant 1927.

Dès ce moment, de Gaulle n'est plus tout à fait un officier comme les autres. C'est le début d'un désaccord grandissant qui scellera le destin de Charles de Gaulle. Le différend éclate en 1927. Pétain confie à de Gaulle la mise au point de trois conférences qu'il donnera à l'École de Guerre. Le maréchal revendique alors la paternité des textes confiés à la rédaction de Charles de Gaulle. Et si celui-ci obtient, parallèlement, de son protecteur des promotions successives – état-major de l'armée du Rhin puis commandement du 19e, bataillon de Chasseurs à Trèves (octobre 1927 - octobre 1929) ; chef des bureaux Renseignement et Opérations des troupes françaises du Levant (à Beyrouth, de novembre 1929 à octobre 1932) ; enfin et surtout, secrétariat général de la Défense nationale, de novembre 1932 à septembre 1939 – le commandant (1927), lieutenant-colonel (1933) puis colonel de Gaulle (1937) rompt néanmoins l'entente. De Gaulle cesse d'appartenir au cercle des protégés de Pétain. A savoir que la connaissance du Moyen-Orient lui sera, en d'autres temps, utile (quand il est muté au Liban - de 1929 à 1932). De plus, de Gaulle s'initie aux affaires de l'État quand il entre au secrétariat général de la Défense nationale.

Durant cette période, Charles de Gaulle publie de nombreux articles dans lesquels il fait connaître sa doctrine en matière de stratégie militaire. Insistant notamment sur l'importance de la mobilité et de l'effet de surprise au détriment du classique plan de bataille élaboré a priori, il s'attire les réprobations virulentes de l'entourage de Pétain. C'est à cette époque qu'il publie ses livres : mars 1924, publication chez Berger-Levrault de son premier livre, La discorde chez l'ennemi. En juillet 1932, ce n'est plus un livre d'histoire mais un essai très personnel que, du retour de Levant, de Gaulle donne à Berger-Levrault, Le fil de l'épée. En fait, c'est dès la parution de Vers l'armée de métier, en mai 1934, que s'est creusé définitivement le fossé entre de Gaulle et l'État-major, mais aussi et surtout, avec Philippe Pétain.

Son livre Vers l'armée de métier plaide pour la refonte d'une armée française professionnalisée et augmentée de 100000 hommes, pour la création d'unités blindées et mobiles et pour une stratégie en mouvement opposée à la guerre statique. Seuls Paul Reynaud et Philippe Serre comprennent l'intérêt de ces thèses. Officiellement, le divorce des deux hommes ne sera consommé qu'en 1938, avec la parution de La France et son armée, Pétain ne pardonnant pas à de Gaulle de publier sous son nom ce texte dont il lui avait passé commande treize ans plus tôt avant de s'en désintéresser.

Colonel en 1937, Charles de Gaulle est nommé à la tête du 507e Régiment de chars de combat à Metz. Plus que jamais, il est en contact étroit avec Paul Reynaud en qui il voit le seul homme capable de renverser le cours des choses si le pouvoir et les moyens d'exercer s'offrent un jour à lui. Mais celui qu'on surnomme avec ironie le "colonel Motor" n'est guère apprécié du général Henri Giraud qui gouverne la ville de Metz.

Quand la France déclare la guerre à l'Allemagne, le 3 septembre 1939, de Gaulle est, depuis la veille, commandant par intérim des chars de la première armée. Le 10 mai, l'Etat-major lui confie avec réticence le commandement de la 4e division cuirassée en cours de formation. Avec des forces éparses, il s'illustre néanmoins à Montcornet et Laon, et arrête les Allemands à Abbeville (27-30 mai 1940). Il démontre ainsi la justesse de ses analyses de 1934. Le 5 juin, Charles de Gaulle, nommé général de brigade à titre temporaire quatre jours auparavant, entre au gouvernement de Paul Reynaud, alors président du Conseil, en tant que sous-secrétaire d'État à la Guerre. Mais il est trop tard, la bataille de France est perdue.

A Londres, Winston Churchill est persuadé de l'imminence de la capitulation française. Reynaud décide donc d'envoyer de Gaulle en Angleterre pour le convaincre du contraire. Accessoirement, le nouveau sous-secrétaire d'État se voit confier, sans trop d'illusions, une autre mission : ramener la RAF dans le ciel de France... Avant de s'envoler pour Londres, le 9 juin, de Gaulle se rend chez le général Weygand qui lui annonce que le front de la Somme est enfoncé.

Quand le général de Gaulle débarque à Downing Street, le lendemain matin, l'accueil est tout autre. Churchill a déjà entendu parler par Reynaud du théoricien incompris des blindés. Si le général est immédiatement fasciné par Churchill, le Premier ministre britannique et la plupart de ses ministres sont pareillement réduits par son flegme et sa détermination, qualités qu'ils n'avaient guère eu l'occasion d'apprécier jusqu'alors, chez aucun dirigeant français... Mais s'agissant des renforts aériens, Churchill laisse son visiteur regagner le France avec seulement quelques vagues promesses. Le soir même, de Gaulle arrive à Paris pour apprendre par la bouche de Reynaud que le gouvernement a décidé de se replier.

Quelques jours plus tard, le 16 juin au matin, le revoici à Londres, à l'hôtel Hyde Park, où il entame un brin de toilette avant de se rendre à déjeuner chez Winston Churchill où un projet émane entre les deux hommes : faire une "fusion" entre la France et la Grande-Bretagne. Le soir même, de Gaulle revient donc à Bordeaux (ville où le gouvernement se trouve après repliement) porteur d'une proposition d' union franco-britannique. Mais ce 16 juin au soir, quand le sous-secrétaire d'État à la Guerre auquel Churchill a prêté son avion personnel, atterrit à vingt et une heure trente à Bordeaux, il n'est plus qu'un ancien ministre. Paul Reynaud n'est plus président du Conseil. Il a, quelques minutes auparavant, remis sa démission au président de la République, Albert Lebrun, lequel s'est aussitôt tourné vers le Maréchal Pétain pour former le nouveau gouvernement. Ce nouveau gouvernement Pétain-Laval déclare son intention de demander l'armistice. De Gaulle conclue que l'Angleterre accueillera la "flamme de la Résistance française".

Le 17 juin vers midi, Charles de Gaulle s'envole pour Londres. Il sait que les liens sont brisés avec la France "officielle". La famille de Gaulle (Yvonne et ses enfants) embarquera le 17 juin à Brest, sur le dernier bateau quittant légalement la France pour l'Angleterre. Le jour même, il obtient de Churchill l'autorisation de s'adresser le lendemain aux Français par la BBC. De Gaulle voit afficher dans tout les kiosques français en éditions spéciales : "France surrenders", la France a capitulé. Le 18 juin 1940, vers vingt heures, devant les micros de la BBC, Charles de Gaulle lance un appel solennel à la poursuite des combats et proclame que la "Flamme de la Résistance Française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas". Dès lors, le gouvernement de Vichy déclare de Gaulle hors-la-loi. Quant à Churchill, il le reconnaît "chef des Français libres".

De Gaulle se donne deux priorités : - construire un début d'organisation et transformer cette reconnaissance de fait en reconnaissance de droit. Bref, faire en sorte que les premiers Français libres n'incarnent pas une légion de combattants au service de l'Angleterre, mais l'embryon d'une organisation appelée, le jour venu, à incarner la légitimité française. La France libre n'a pas encore d'armée, de Gaulle la constitue avec des inconnus et des aventuriers. René Cassin établit le statut des Forces Françaises Libres (FFL). Condamné à mort par le tribunal de Clermont-Ferrand le 2 Août 1940, matériellement et politiquement isolé, le Général est pourtant de moins en moins seul. De Gaulle connaît une grave défaite avec les FFL et les Britanniques face aux canons des troupes de Vichy à Dakar. Le Général est discrédité aux yeux de Franklin Roosevelt.

Cependant, en cet été 1940, l'ensemble de l'Afrique équatoriale et les comptoirs français de l'Inde se rallient à Charles de Gaulle. En septembre 1941, le Général crée le Comité National Français, qui deviendra le Comité National de Libération le 3 juin 1943. Le but : que tous les Français, quelles que soient leurs différences, s'unissent dans la Résistance. Seul représentant de la France au combat vis-à-vis des alliés, de Gaulle s'impose aussi comme maître incontesté des Forces de la Résistance Intérieure.

En fin d'année 1941, il fait venir à Londres Jean Moulin, un préfet révoqué par Vichy, en raison de ses convictions républicaines. Il lui prescrit de rassembler sous son autorité les forces disséminées de la Résistance. Mais Jean Moulin ne pourra accomplir complètement son désir d'union. Trahi et arrêté par la Gestapo, il meurt suite à ses blessures, le 8 juillet 1943, ayant subi la torture des hommes de la Gestapo. Charles de Gaulle y laisse un ami, l'artisan et le numéro deux de la Résistance car, c’est avec l’action de Jean Moulin, homme de foi et de calcul, ne doutant de rien mais se défiant de tout que Charles de Gaulle a pu organiser une résistance sans faille, faite de tous les mouvements de combats. Ainsi, le CNR, qui a été réuni à Paris sur ordre du Général et sous la Présidence de Jean Moulin, reconnaît de Gaulle pour chef, en vue de la Libération. Désormais, la légitimité du chef de la France Libre n'est plus contestée par les Alliés, malgré les tensions entre lui et Churchill. Le 3 juin 1944, de Gaulle devient le président du Gouvernement Provisoire de la République Française (GPRF).

Le 6 juin 1944, le débarquement allié en Normandie est déclenché. Cinq jours plus tard, le Général débarque à Courseulles-sur-Mer, où l'accueil d'une foule enthousiaste prend valeur de plébiscite. Le 25 Août 1944, Charles de Gaulle entre dans Paris à seize heures par la porte d'Orléans où il est accueilli par le général Leclerc (1902-1947) qui vient d'obtenir la capitulation du général allemand von Choltitz. L'homme du 18 juin avait demandé à Leclerc, quelques jours plus tôt, à Rambouillet : "Libérer Paris avec une division blindée, nul chef n'a jamais eu une chance plus grande, mais nul ne l'a mieux méritée !" ; il le dit à son "noble compagnon".

Le 26 Août, de Gaulle descend les Champs-Élysées entouré des chefs survivants de la Résistance intérieure et est acclamé par un million de Parisiens en liesse. Ils découvrent la voix sans visage de la BBC. C'est à trois heures de l'après-midi qu'il entame sa descente. Il forme, le 8 septembre, son premier gouvernement en métropole, que les Alliés tarderont à reconnaître. Il lui reste à accomplir trois tâches urgentes : - achever la libération du territoire, effective en février 1945 ; - assurer une place de premier plan à la France dans les négociations de paix ; - rétablir la légalité républicaine qui servira de base à la reconstruction.

1945 est loin d'être une année d'insouciance. Certes, l'Allemagne vient de signer la capitulation. A Reims d'abord, le 7 mai, et à Berlin, le 8. Mais la France n'a pas été invitée à l'ouverture de la Conférence des Vainqueurs à Yalta, et de Gaulle s'en affecte assez pour refuser la proposition que lui fait Franklin Roosevelt d'une rencontre à Alger. Si la carte du monde de demain veut se faire sans lui, il obtient néanmoins par Churchill que la France soit membre de droit du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies (ONU).

En France, les signaux politiques ne donnent guère d'optimisme. Libérateur du territoire, chef de l'exécutif, de Gaulle se heurte au système des partis, qu'il a contribué à ranimer en 1943 après l'échec de la création d'un grand parti de la Résistance. Après le référendum du 21 octobre 1945 approuvant le projet de Constitution qu'il appuie, de Gaulle doit surmonter une grave crise politique au sein du gouvernement "tripartite". Certes, la consultation du peuple comportait deux questions : "Voulez-vous que l'Assemblée élue ce jour soit constituante ?" et "S'il y a une majorité de oui à la première question, approuvez-vous l'organisation provisoire des pouvoirs publics organisée par le gouvernement ?", celle-ci n'en est pas moins une réussite (96 % de "oui" à la première, 66 % à la deuxième) ce qui crée des hostilités. Dès le 15 novembre, Maurice Thorez du Parti Communiste exige, en tant que premier parti de France, obtenir l'un des trois ministres clés, à savoir, la Défense nationale, l'Intérieur ou les Affaires Étrangères.

De Gaulle refuse et le PC renonce à ses exigences après que le Général menace d'en appeler le peuple. Pourtant, une nouvelle crise au sein du gouvernement se produit. L'homme du 18 juin est convaincu de l'impossibilité de faire coexister "régime des partis" et "intérêts de la Nation". Aussi, de Gaulle annonce brusquement le 20 janvier 1946, sa décision de se retirer.

Après être resté quelques mois à l'écart de la vie politique, de Gaulle fait sa rentrée lors de son discours de Bayeux, en juin 1946, au cours duquel il expose dans un discours programme les grandes lignes de son projet de Constitution, préfiguration de celui de 1958, s'opposant au projet adopté en octobre 1946 lors de la fondation de la IVe République. En effet, Charles de Gaulle est un adversaire résolu du "régime des partis". En avril 1947, il annonce à Strasbourg la création du Rassemblement du Peuple Français (RPF), dont le courant conservateur devient vite dominant.

Charles de Gaulle mesure 1m92, avec de grands pieds, de grandes mains, et un grand nez. La taille lui vaut d'être surnommé à Saint-Cyr "la grande asperge", "le dindon", le "saut-en-hauteur", "double mètre". Son allure gauche se transformera avec l'âge et deviendra majestueuse. Sa taille influence son comportement : ainsi, ses examinateurs à l'École de Guerre lui reprochent-ils de "le prendre de haut".

Au moral, un caractère solitaire et impérieux, une nature passionnée, impitoyablement disciplinée. Il y a en lui deux personnages : - l'homme privé et - l'homme public (dont il parle de lui-même à la 3e personne en disant "de Gaulle"). L'homme privé est capable de bonhomie, gai, appréciant les plaisanteries même triviales. Les goûts sont simples. Il aime les promenades à pied dans la campagne, les réunions de famille, la cuisine bourgeoise (pot-au-feu, potée lorraine, bœuf bourguignon et un fromage du Nord, la mimolette). Il lit beaucoup (Samain, Bergson, Valéry, Maurras, Flaubert, Racine...) mais son livre préféré est Les mémoires d'Outre-Tombe. Doué d'une mémoire prodigieuse, il peut réciter des passages entiers de classique par cœur, mais il écrit lentement, et avec difficulté. Dès l'enfance, il témoigne d'un très mauvais caractère, détestant perdre au jeu (plus tard, il trouvera difficilement des partenaires au bridge).

Le 7 avril 1947 à Strasbourg, Charles de Gaulle déclare officiellement la naissance du Rassemblement du Peuple Français (RPF) : une entreprise de mobilisation nationale, une nouvelle Résistance. Trois semaines après sa création, le 1er mai 1947, le RPF annonce 810 000 demandes d'adhésion, le 5 octobre 1947, il compte 1 500 000 membres. Les 19 et 26 octobre de la même année, le RPF remporte un large succès aux élections municipales. Dans les communes de plus de 9000 habitants, les listes qu'il a présentées ou patronnées obtiennent près de 40 % des suffrages exprimés. Sur quatre-vingt-douze chefs-lieux de départements, cinquante-deux ont selon le Général de Gaulle, un maire élu sous le signe du RPF. Mais cet élan ne dure pas. Dès 1948, en dépit d'une certaine instabilité gouvernementale, le RPF tourne à vide. Suite aux élections sénatoriales de novembre 1948 et aux cantonales de mars 1949, qui apportent des succès appréciables, mais d'une portée limitée, le RPF en est réduit à miser sur les élections générales de 1951 pour accéder légalement au pouvoir. Les élections, qui se déroulent selon le système des apparentements refusé par de Gaulle, se traduisent par un score peu élevé pour le RPF : 21,7 % des suffrages exprimés. C'est néanmoins le groupe le plus important de la nouvelle Assemblée Nationale.

Les élections municipales d'avril 1953 se révèlent, en revanche, comme un désastre pour le RPF qui perd la moitié de ses sièges. De Gaulle en tire les conséquences : "Voici venir la faillite des illusions. Il faut préparer le recours". La fin du Rassemblement parlementaire a sonné : le groupe se scinde en Républicains sociaux et Union des républicains d'action sociale.

Après la fin du RPF, commence alors pour Charles de Gaulle, selon l'expression d'André Malraux, "la traversée du désert". Retiré à Colombey-les-Deux-Églises, de Gaulle voyage (Afrique et Océan Indien, 1953 ; Océan Pacifique et Sahara, 1957) et publie ses Mémoires de guerre (1954).

L'année 1958 donne fin à la IVe République. L'instabilité ministérielle dont souffre le régime et la gravité du problème algérien réclament des solutions claires et urgentes. Au printemps, les appels adressés au Général se multiplient, et une antenne algéroise, du ministre de la Défense Nationale, Jacques Chaban-Delmas, travaille à préparer son retour au pouvoir. Le 13 mai, alors que Pierre Pflimlin vient de former un gouvernement, éclate à Alger un soulèvement pour la sauvegarde de l'Algérie française. Deux jours plus tard, de Gaulle déclare qu'il est "prêt à assumer les pouvoirs de la République". Le Président René Coty débloque une situation tendue à l'extrême en invitant, le 29 mai, le Général de Gaulle à former un gouvernement doté des pleins pouvoirs pour entamer une révision constitutionnelle et trouver une issue à la guerre d'Algérie. Le 1er juin, la Chambre des députés lui accorde sa confiance par 329 voix contre 224. A l'été 1958, une Constitution est rédigée, que 80 % des Français approuvent par référendum. Charles de Gaulle devient officiellement chef de l'État le 8 janvier 1959. Il vient de fonder la Ve République.

Les années qui s'annoncent seront celles de l'indépendance algérienne, de la décolonisation et de la modernisation de la France. L'Algérie d'abord, sollicite l'énergie du chef de l' Etat, qui adopte une ligne pragmatique évoluant par adaptations successives aux circonstances.

Après l'appel du 4 juin 1958, où le général prononce devant la foule algéroise le célèbre "Je vous ai compris !", de Gaulle opte en 1959 pour une pacification, base de l'autodétermination des Algériens, que refusent les partisans de l'Algérie française. Les insurrections de janvier 1960 et d'avril 1961, appuyées par l'Organisation Armée Secrète (OAS), ne parviennent néanmoins pas à enrayer l'autodétermination, dont le droit est reconnu aux Algériens par les accords d'Evian signés le 18 mars 1962, grâce aux négociations menées par Georges Pompidou, alors directeur de cabinet du Général de Gaulle, et Louis Joxe, ministre des Affaires algériennes.

Le 3 juillet 1962, Charles de Gaulle reconnaît l'indépendance de l'Algérie. Mais, le 22 Août 1962, il est victime d'un attentat perpétré au Petit-Clamart, à proximité de l'aéroport de Villacoublay, où il échappe de peu à la mort. La voiture présidentielle est mitraillée tandis que Francis Marroux, son chauffeur, se trouve au volant. Cette action de l'OAS témoigne, au lendemain de la signature des accords d'Evian, de l'état d'esprit des partisans de l'Algérie française qui n'ont pas accepté l'indépendance algérienne.

Dès 1956, Charles de Gaulle a compris que la France ne peut plus conserver "l'Empire", et il entame une politique de décolonisation qui passe par l'instauration d'une communauté franco-africaine (1958 et 1960) au sein de laquelle l'indépendance des États membres est reconnue.

L'après-guerre est dominée par l'hégémonie des deux blocs Est - Ouest. La France est devenue une puissance moyenne pour laquelle le Général conserve encore des ambitions. Fidèle à l'idée d'État-Nation, de Gaulle détermine sa politique internationale en fonction des principes de souveraineté et d'indépendance qu'il veut garder à la France. Partisan du maintien de l'Alliance Atlantique, conclue en 1949, de Gaulle refuse clairement la position subalterne qu'entraîne le "dispositif intégré" des forces militaires de l'OTAN (Organisation du Traité de l'Atlantique du Nord) en Europe. La mise au point de l'arme nucléaire, opérationnelle en 1968, lui apparaît comme l'instrument indispensable de l'indépendance nationale. Quant à l'Europe, dont les accords de Rome, signés en 1957, ont jeté les fondations, de Gaulle l'observe avec circonspection. Tout en souhaitant sa construction, il rejette fermement l'option supranationale que semble vouloir lui insuffler l'axe anglo-américain. C'est donc logiquement qu'il oppose son veto à la candidature anglaise, et tente de développer avec le chancelier Konrad Adenauer un axe Paris-Bonn qui s'effritera en 1963, surclassé par la déclaration de John Kennedy en Allemagne : "Ich bin ein Berliner". Refusant l'esprit de Yalta, de Gaulle tente d'établir des liens directs avec l'URSS et ses pays satellites (Pologne, Roumanie et Tchécoslovaquie) qu'il visite en 1967 et 1968, et auxquels il adresse un message d'indépendance. Cette stratégie d'opposition à Yalta le conduit à la reconnaissance de la Chine populaire (1964), au défi lancé à la politique indochinoise des Américains (1967). Franchissant un pas supplémentaire dans la logique d'éclatement des blocs qu'il poursuit, de Gaulle défend l'indépendance nationale des pays où s'affirme la prépondérance économique et politique américaine, lors de son voyage au Mexique et en Amérique latine (1964) puis au Québec ("Vive le Québec libre !", 1967).

1er tour du scrutin : Il a plu ce jour-là, sur toute la France, mais les records de participation du référendum de 1958 et des élections du Front Populaire ont été battus. En effet, le 28 octobre 1962, le référendum sur l'élection présidentielle est adopté par 61,75 % des suffrages exprimés. Pour cette première élection au suffrage universel, il n'y a eu que 15,2 % d'abstentions, 0,8 % de bulletins blancs ou nuls. Mitterrand est en tête dans 20 départements (6 du centre, 14 du Sud-Ouest et du Midi méditerranéen), dans 37 des 80 communes de la Seine, dans 90 villes importantes. D'après les sondages, il aurait recueilli 87 % des voix communistes, 55 % des voix socialistes et radicales, 6 % des voix MRP.

2nd tour de scrutin : la proportion des abstentions (15,6 %) est comparable à celle du 1er tour. Celle des bulletins nuls ou blancs est un peu plus élevé (2,3 %=). Les villes, les éléments catholiques, les femmes de plus de 35 ans ont, en général, voté pour de Gaulle ; les campagnes, les hommes, les jeunes ont préféré en majorité Mitterrand.

Mais en France, l'usure du pouvoir semble marquer le deuxième septennat du général de Gaulle. Les déclarations et les prises de position du chef de l'État à propos du Québec ou du conflit israélo-arabe notamment, effrite la confiance de l'opinion. En 1965, lors de la première élection au suffrage universel, il est réélu, mais au second tour, avec seulement dix points d'avance sur François Mitterrand. L'exercice solitaire du pouvoir est dénoncé, à droite comme à gauche. Et l'opposition conduite par François Mitterrand, a le vent en poupe. Le pouvoir de De Gaulle s'érode. Minijupe et bikini : la société change. De Gaulle, né dans le siècle précédent, semble de plus en plus archaïque. Au mois de mai 1968, éclate la révolte de la jeunesse française, écho inédit et violent des aspirations et de la crise sociale qui traduisent, outre l'essoufflement d'un régime, l'ébranlement profond du corps social.

De Gaulle ne comprend pas et dénonce la "chienlit". Le 30 mai, après une fuite éclair à Baden-Baden en Allemagne, le Général annonce la dissolution de l'Assemblée. C'est Georges Pompidou qui met fin à l'agitation sociale en signant les accords de Grenelle avec les syndicats. dans la foulée, le Général de Gaulle obtient un raz-de-marée en sa faveur aux élections législative de juin 1968. Mais c'est déjà la fin de l'ère gaulliste. Prétextant une réforme régionale et une réforme constitutionnelle, de Gaulle pense retrouver une légitimité en proposant un référendum aux Français. Valéry Giscard d'Estaing, dénonçant "l'exercice solitaire du pouvoir", annonce qu'il votera non. Georges Pompidou, qui a été remplacé au poste de Premier Ministre par Maurice Couve de Murville, se déclare candidat à la succession du général en cas de démission.

Le 27 avril 1969, Charles de Gaulle recueille près de 53 % de "non". Le lendemain, à 0 h 10, par un communiqué diffusé à l'AFP, de Gaulle annonce "Je cesse d'exercer mes fonctions de Président de la République". Pompidou lui succède.

De Gaulle espérait vivre jusqu'à 85 ans environ (c'est-à-dire jusqu'en 1975), ayant calculé qu'il aurait achevé ses Mémoires d'espoir. En août 1970, le plan du dernier tome est établi, et 2 chapitres sur 8 sont rédigés. Le 2 novembre, on fête la Saint-Charles (en avance de deux jours pour lui permettre de profiter de la présence de ses petits-enfants). Le lundi 9, il se promène malgré le mauvais temps, et travaille à son livre. A 19 h 10, alors qu'assis à sa table de bridge, il fait une réussite selon ses habitudes, il est saisi d'un malaise à la suite d'une rupture d'anévrisme, et perd connaissance. A 19 h 15, lorsque le curé, convoqué avec le médecin, lui administre l'extrême-onction, il respire encore mais il est dans le coma. Il s'éteint à 19 h 30, étendu sur un matelas dans le salon. La famille ne fait diffuser la nouvelle que le lendemain matin, pour retarder l'afflux de visiteurs à Colombey, sa résidence. Le 10 novembre, à 13 h 00, dans une brève allocution radiotélévisée, Pompidou, nouveau président de la République, annonce officiellement la mort du Général : "La France est veuve".

De Gaulle avait réglé ses obsèques dans un testament daté du 16 janvier 1952, établi en trois exemplaires remis, l'un à Georges Pompidou, le 2ème et le 3e à ses enfants Philippe et Elisabeth. Dedans, il souhaite que les obsèques soient très simples, aucun discours, aucune autre inscription que "Charles de Gaulle 1890....", que sa tombe soit celle où repose déjà sa fille Anne et où un jour reposera sa femme, tout ceci à Colombey-les-Deux-Églises.

Une cérémonie officielle aura lieu à Notre-Dame de Paris, à 11 heures, en présence de nombreux chefs d'Etat, le jeudi 12 novembre 1970, ce jour décrété jour de deuil national.






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